Jouer avec le feu
- Blanc Lapin
- 26 janv.
- 2 min de lecture
De Delphine Coulin, Muriel Coulin

"Jouer avec le feu" de Delphine Coulin et Muriel Coulin a reçu d'excellentes critiques au festival de Venise. Porté par Vincent Lindon, Benjamin Voisin, Stefan Crepon, le film suit Pierre qui élève seul ses deux fils. Louis, le cadet, réussit ses études et avance facilement dans la vie. Fus, l’aîné, part à la dérive. Fasciné par la violence et les rapports de force, il se rapproche de groupes d’extrême-droite, à l’opposé des valeurs de son père. Pierre assiste impuissant à l’emprise de ces fréquentations.
Ce qui marque c'est évidemment le jeu de Vincent Lindon qui mérite amplement son prix d'interprétation à Venise et la symbiose avec ces deux jeunes acteurs qui montent en France et qui relèvent chacun à leur manière le défi. Benjamin Voisin est flippant de par son regard frondeur et toute la haine qui passe par son regard et son corps qui bondit dans tous les sens tel un tigre sur ses victimes. On sent la tension montée de par ce jeu inversé du calme froid de Lindon et Stefan Crepon à ce sombre bouillonnement de l'autre côté. Les réalisatrices auraient pu davantage insister sur le basculement et les raisons profondes de cette transformation d'un jeune homme en fasciste convaincu des idées d'ultra droite. Il en fait l’apologie en venant d'un milieu de gauche cheminot. Il aurait été intéressant d’exploiter les raisons de ce schisme avec une éducation aux antipodes. On comprend certes qu'il a n'a pas fait d'études et d'ailleurs le film n'est ni cliché sur cet aspect ni sur une jalousie mal placée vis à vis du petit frère. On comprend que le vide laissé par la mère disparue est un élément. Il ne se voit pas d'avenir et plus comme un laisser pour compte de la mondialisation qui déverse par millions des électeurs dans les bras de nos pires souvenirs historiques. Si le film échoue sur le pourquoi, question la plus délicate à laquelle si nous avions des réponses, nous n'en saurions pas là, le plus réussi est d'expliquer comment cette fracture sociétale de 40% des électeurs qui votent et pensent extrême est impossible à endiguer. Aucun argument, aucune discussion n'a de prise et comme ce père en incapacité d'agir, la société regarde une autre partie se détacher de façon définitive et penser contre l'autre, stigmatiser l'autre comme quelquechose de naturel, se voilant dans les draps de la liberté d'opinion, d'expression et le fait qu'une démocratie se doit de tolérer toutes les opinions. La perversion des âmes puis la perversion des principes de fraternité par ce poison du refus de l'autre, de l'identitarisme pour s'enfermer entre soit est palpable dans Jouer avec le feu car il se construit à l'échelle d'une famille aimante. Le film aurait gagner en force et puissance si il avait su prendre plus de cette hauteur et ne pas trop se limiter à la capacité de résilience de la famille, par amour. D’idéologie et de discussions sur le fond il n'y en n'a hélas pas assez. Alors ceci permet d'éviter les poncifs et les leçons de morale, ce qui est très bien mais il manque ce rouage pour que le film vise totalement sa cible.
La piste aux lapins :

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