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Les Barbares

De Julie Delpy


A Paimpont, l’harmonie règne : parmi les habitants, il y a Joëlle - l’institutrice donneuse de leçons, Anne – la propriétaire de la supérette portée sur l’apéro, Hervé – le plombier alsacien plus breton que les Bretons, ou encore Johnny – le garde-champêtre fan de… Johnny. Dans un grand élan de solidarité, ils acceptent avec enthousiasme de voter l’accueil de réfugiés ukrainiens. Sauf que les réfugiés qui débarquent ne sont pas ukrainiens… mais syriens ! Et certains, dans ce charmant petit village breton, ne voient pas l’arrivée de leurs nouveaux voisins d’un très bon œil. Alors, au bout du compte, c’est qui les barbares ?

Après ses succès critiques et publics 2 Days in Paris puis 2 Days in New York, l'actrice et réalisatrice Julie Delpy, a eu moins de succès avec ses deux films suivants. On lui en souhaite en revanche beaucoup avec cette comédie très réussie sur un thème d'actualité casse gueule, qu'on devrait montrer en prime sur les grandes chaines.


En premier lieu sont film est drôle et la salle se marre, ce qui est loin d'être la norme dans le style complexe des comédies où la paraisse des producteurs et scénaristes et la laideur des réalisations accouche chaque année de son lot de comédies bien lourdes et franchouillardes.


Ici, Delpy se moque justement du français moyen vivant dans des villages désertifiés, n'ayant jamais vu d'étranger de sa vie et voyant débarquer du jour au lendemain une famille de syriens réfugiés. Mais elle le fait d'une part avec tendresse et d'autre part sans omettre de se foutre de la gueule de l'angélisme de personnes très engagées qui sous-estiment la difficulté d'intégration. Son scénario enchaine les remarques et situation racistes d'un racisme banal et oh combien répandu. On n'a pas 40% de votre extrême droite pour rien. Mais c'est fin. Ou plutôt, les personnages incarnent des caricatures mais ce n'est jamais sur-joué et çà sonne juste. Pour cela, elle se donne le rôle de l'instit donneuse de leçons mais le cœur sur la main, celui du facho triste sire à un Laurent Lafitte excellent en mec qui n'est jamais sorti de chez lui, à Sandrine Kiberlain celui de sa meilleure amie un peu alcoolo, et le reste du casting est du même niveau, excellent.


Le film n'en n'oublie pas l'émotion mais elle vient intelligemment en montrant cette famille d'intellectuels rabaissée du jour au lendemain à la mansuétude et la condescendance d'un village peuplé d'individus qui n'ont ni bossé autant qu'eux pour y arriver ni vécu l'enfer qu'ils on traversé.


L’indécence de ces regards qui ont besoin qu'on leur prouve que les migrants ont vraiment souffert pour les accepter, est montrée avec tellement d'intelligence sur la bêtise humaine et le fait que ces pays en guerre sont tellement loin qu'on s'en fout au final. On détourne le regard, même quand on est citadin d'une grande ville, c'est humain mais çà se résume à cela, on regarde ses petits problèmes point. Julie Delpy a ainsi le tact d'étriller non pas le franchouillard de la France perdante de la mondialisation, qui vote RN et s'enferme sur elle-même. Non, elle apporte des explications assez universelles et même des explications à travers ces petites phrases, cette peur, cette ignorance qu'il est tellement plus facile d'entretenir et sur lesquels nos populistes surfent allègrement.


Le fait de ne diaboliser aucun personnage et de ne pas faire des réfugiés des gens faibles et perdus apporte la subtilité nécessaire à l'exercice. Un film rusé et efficace, mordant.


La piste aux Lapins :



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